Allo, Papa, Tango,Charly, répondez nous vous cherchons
Le cheval était prêt, je voulais faire un essai de l’emmener sans mors dans la bouche pour voir s’il avait les mêmes problèmes de salivation. Donc au licol et une paire de rênes. L’appareil photo est glissé dans la poche du tapis de selle et plutôt que d’en faire autant avec mon téléphone, je le glisse dans la poche, côté cœur de ma veste et ferme la fermeture éclair. Le chemin monte dans la pierraille et parfois, il faut baisser la tête et se coucher sur l’encolure pour éviter les branches hautes mais le plus souvent c’est le calme et j’alterne les allures du cheval à notre convenance à tous les deux, accompagnés de la clochette de la chienne qui parfois s’éloigne lorsqu’elle sent une bonne odeur de bête fauve, genre sanglier.
Je ne veux pas trop traîner, je dois travailler l’après-midi et entre temps, ravitailler le bunker des malades. Je n’ai pas l’heure, ma montre est restée à la maison, c’est donc mon petit portable qui peut me renseigner. Le tour me semble assez rapide, une bonne heure quand même mais nous avons peut-être le temps de laisser brouter le cheval. Je porte la main à ma poche et m’aperçois qu’elle est vide. A la place, au fond, un trou… le portable s’est échappé.
Comme la plupart des gens, j’ai pleins de choses sur la petite puce sans compter que mes proches ou mes patients pourraient vouloir me joindre.
Ni une, ni deux, je ramène le cheval et repars à pieds, chienne en laisse à la recherche de la bête. Je refais tout le tour, les yeux rivés au sol, ce qui me prend 1H1/4 mais rien. Je n’ai plus qu’à rentrer déjeuner.
J’ai vraiment besoin de ce téléphone et l’idée me vient qu’avec un autre je pourrais essayer de l’appeler ; juste le temps de prévenir mes premiers patients, d’avaler un morceau et me voilà repartie sur le sentier. 100 pas, je m’arrête, j’appelle, j’écoute, je raccroche. Encore 100 pas et ainsi de suite tout le tour, les yeux au sol.
Je reviens donc, la mort dans l’âme au tronçon commun qui me permet de rentrer. J’ai déjà essayé d’appeler à cet endroit et n’y crois plus guère mais après tout, je n’ai rien à perdre et pour la 63ème fois, je tente de faire le numéro et d’écouter. D’abord je n’entends rien puis un faible son au loin, quelques notes de musique, puis plus rien. Pas de doute, il est tout près, je recommence, la musique se rapproche jusqu’au moment où je mets enfin la main dessus… dans un fourré piquant, tout au fond, là où je n’aurais jamais pensé qu’il put aller se foutre.
Mais cette histoire me rappelle vaguement quelque chose. Ce même téléphone, ne l’avais-je pas déjà perdu il y a quelques années ?