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Un certain chêne vert
22 octobre 2011

Souvenirs d'un voyage

Le train filait à 300 Kms/heure et les oreilles, peu accoutumées, se bouchaient désagréablement, obligeant à avaler constamment la salive. « Vitesse maximum » nasilla une voix anonyme, venant de nulle part. Quelques minutes plus tard, c’est du même timbre impersonnel que la voix se manifestait de nouveau, peut-être pour maintenir le voyageur éveillé ou alors, nous étions surveillés par des yeux inconnus. Un voyageur cafteur s’était-il introduit parmi nous, renseignant la machine à distribuer les recommandations ? Cette fois elle nous enjoignait à rester discrets avec nos téléphones portables, ce que semblait ignorer mon voisin de devant qui aboyait sa langue (peut-être de l’arabe) dans le combiné de son petit appareil.

Certains, des coutumiers des transports ferroviaires, dormaient, la tête appuyée sur le dossier, maintenue dans un équilibre instable, insensible aux fluctuations des rails sous nos pieds et qui révélaient une grande habitude. Moi aussi, finalement, je pus m’assoupir. J’étais fatiguée par un lever à l’aube dans l’air glacé de la montagne sous une neige qui n’avait cessé de tomber depuis le milieu de la nuit, remplaçant les fortes pluies de la veille. J’avais failli louper mon train à cause du déneigement indispensable pour sortir la voiture du garage. Mon sommeil était entrecoupé de réveils à chaque fois que ma tête indocile tombait vers l’avant, refermant d’un coup sec, ma bouche largement ouverte, de celle qui donne un air bête au dormeur.

Encore une demi-heure avant d’arriver, le train longeait une mer moutonneuse, le soleil dans les yeux j’essayais d’entrevoir les bateaux. J’allais arriver dans le pays du « toujours beau » ou presque. Ma pensée s’orienta sur Lui, il était sans doute sur le chemin de la gare et je le retrouverais sur le quai qui m’attendrait le sourire aux lèvres, pressé de m’amener chez nous, dans notre futur, moi qui vivais encore dans mon passé, celui de la montagne que j’aimais.

Je retournai donc, cette fois bien éveillée à l’observation des autres voyageurs. La fille d’à côté avait un petit air de Nana Mouskouri et dormait sans relâche. Devant, une femme arabe, peut-être la femme du téléphoneur qui téléphonait toujours, s’occupait de son bébé qui braillait, les yeux rougis de fatigue. Elle tentait de le bercer, le faisait passer d’une épaule à l’autre sans aucun succès. La pauvre elle devait s’occuper en plus du grand frère qu’il fallait revêtir en vue de l’arrivée, ce qui n’était pas facile dans cet endroit exigu. C’était un bel enfant, d’environ cinq ans, aux cheveux noirs et bouclés, à la peau mate et au regard coquin qui s’amusait avec son jeu électronique, assis à côté de son père, à moins que ce ne fut son grand-père, il faisait si vieux l’homme au téléphone.

Le train ralentit, la voix retentit encore pour nous annoncer l’arrivée en gare: Ils espèraient même nous avoir apporté une entière satisfaction.

Je saute sur le quai, il est là qui m’attend, le sourire aux lèvres. Il m’emmènera peut-être dans les tréfonds de la planète, un endroit connu de lui seul.

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Commentaires
F
encore moi dans tes bagages<br /> trop bien<br /> je voyage souvent en train et j'écris souvent ces moments, mais n'ai plus de blog<br /> une grande histoire d'amour !
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Un certain chêne vert
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