Les dames de jadis
Il faut des jours de pluie sans fin pour avoir des idées saugrenues : l’idée qu’on est au 13ème siècle dans cette bonne ville d’Hyères. Un jeune homme remonte la rue étroite où coule violemment dans la rigole un ruisseau engendré par une pluie d'automne. Il s’est arrêté un instant, contemplant la maison de pierres au coin des ruelles. A-t-il vu cette adolescente alanguie qui regarde au loin à travers les vitres dépolies? On peut le supposer puisqu'il reste immobile, les yeux rivés sur la grande fenêtre voûtée Le temps est gris et, là-bas, la mer se confond avec les nuages. L’espace s’est rétréci avec les nuées envahissantes. Pourtant l’œil s’attarde sur les arbres des jardins en contrebas et sur les pins du parc au-dessus. La belle rêve, légèrement penchée vers l’avant, la poitrine aplatie par le vêtement au décolleté arrondi qui l’enserre. Elle est demi-assise, sa robe aux larges hanches traîne par terre sur le parquet de chêne. Ses cheveux remontés en tresses sont enserrés dans le touret posé sur le couvre chef de tissu, attaché sous un petit menton volontaire. Son regard n’a pas croisé celui du damoiseau. Il fait froid et elle frissonne. Elle a disparu, happée à l’intérieur de sa maison laissant un instant de vague à l’âme au passant attardé.
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Il faut juste faire abstraction des maisons plus modernes qui entourent les lieux et faire marcher son imagination.